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Temps de lecture estimé : 7 minutes

Vous avez reçu une notification de prise en charge d’un Accident du Travail (AT) ou d’une Maladie Professionnelle (MP). Vous pensiez le plus dur passé. Pourtant, les semaines se transforment en mois et l’arrêt s’éternise. C’est une situation que subissent 90% des employeurs, persuadés à tort qu’une fois l’accident reconnu, il est impossible de contester la durée d’un arrêt de travail. C’est faux. La reconnaissance de l’AT ne donne pas un blanc-seing à la CPAM pour imputer l’intégralité des coûts à votre entreprise. Des armes juridiques et procédurales très puissantes existent pour maîtriser ces coûts. La jurisprudence de 2025 a d’ailleurs massivement renforcé les droits de l’employeur sur ce point.

Points à Retenir

  • Le mythe à briser : La reconnaissance d’un AT ne vaut pas imputation automatique de tous les arrêts de travail qui s’ensuivent. Le lien de causalité doit être maintenu pour chaque prolongation.
  • Stratégie 1 – La « Lésion Nouvelle » : Si un certificat de prolongation mentionne une nouvelle pathologie (ex: un syndrome dépressif après une entorse), la CPAM a l’obligation légale (Art. R.441-16) d’instruire cette nouvelle lésion. Si elle ne le fait pas, les arrêts liés sont inopposables.
  • Stratégie 2 – L’État Antérieur : La jurisprudence (CA Paris, 2025) est claire : si les arrêts prolongés sont liés à un état antérieur (ex: arthrose) et non à la lésion initiale, le lien de causalité est rompu. Vous pouvez demander une expertise pour le prouver.
  • Stratégie 3 – Le Dossier Incomplet : La charge de la preuve de la durée pèse sur la CPAM. Si elle est incapable de fournir l’intégralité des certificats de prolongation justifiant les arrêts, la CMRA (Commission de Recours Amiable) peut juger leur imputation inopposable.

Le Mythe de la « Présomption d’Imputabilité » Absolue

L’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale pose la présomption d’imputabilité : tout accident survenu au temps et au lieu de travail est présumé être un accident du travail. La plupart des employeurs pensent que cette présomption s’étend indéfiniment à toutes ses conséquences, y compris les arrêts de travail de longue durée.

C’est une erreur stratégique majeure. La présomption couvre le fait accidentel initial et ses suites immédiates et directes. Elle ne couvre pas :

  • Une pathologie sans lien direct et exclusif qui se manifeste plus tard.
  • L’aggravation d’un état pathologique antérieur qui aurait évolué pour son propre compte.
  • Une nouvelle lésion apparue au cours de l’arrêt.

C’est sur ces trois failles que se construit une défense efficace pour contester la durée d’un arrêt de travail et non l’accident lui-même.

Stratégie 1 : Traquer la « Lésion Nouvelle » (Le Vice de Procédure R.441-16)

C’est l’arme la plus puissante et la plus méconnue, consacrée par la jurisprudence récente (CA Grenoble, 15 juillet 2025). Le scénario est classique : un salarié est en arrêt pour une entorse au poignet (lésion initiale). Trois mois plus tard, son médecin traitant prolonge l’arrêt, mais mentionne sur le certificat de prolongation : « Syndrome anxio-dépressif réactionnel ».

Cette mention est une « lésion nouvelle ».

À cet instant précis, la CPAM a une obligation légale. L’article R.441-16 du Code de la sécurité sociale stipule que si une « lésion nouvelle » est constatée, la Caisse doit en informer l’employeur et l’instruire selon la même procédure que la déclaration initiale (envoi de questionnaires, etc.).

Or, dans 99% des cas, la CPAM ignore cette obligation et continue de payer les indemnités journalières sans instruction. C’est une carence d’instruction qui vicie la procédure. Vous êtes alors en droit de saisir la CRA pour demander l’inopposabilité de tous les arrêts de travail (et des coûts associés) à compter de la date d’apparition de cette lésion nouvelle non instruite.

Stratégie 2 : Invoquer l’État Antérieur pour Rompre le Lien de Causalité

Cette stratégie ne vise pas la procédure, mais le fond médical. Un salarié est victime d’un AT qui cause une lombalgie. Le CMI est clair. Mais les arrêts s’accumulent pendant un an. Une analyse plus poussée (ou une expertise médicale) révèle que le salarié souffrait d’une discopathie dégénérative sévère et d’arthrose bien avant l’accident.

La jurisprudence récente (CA Paris, 27 juin 2025 ; CA Toulouse, 10 juillet 2025) est formelle : le lien de causalité entre l’AT et les arrêts doit rester direct et exclusif.

Si un expert médical confirme qu’après une période de consolidation normale (ex: 2 mois pour la lombalgie traumatique), les symptômes et arrêts relèvent exclusivement de l’état antérieur dégénératif, le lien est rompu. Les arrêts suivants ne sont plus imputables à l’AT et ne doivent plus impacter votre calcul de taux d’IPP ni votre compte employeur. Pour les dossiers à « longue traîne », il ne faut jamais hésiter à solliciter une expertise pour faire constater cette rupture.

Stratégie 3 : Utiliser le Dossier Incomplet de la CPAM Contre Elle

C’est la défense de la « chaise vide ». La charge de la preuve de l’imputabilité de toute la durée de l’arrêt pèse sur la Caisse, pas sur l’employeur. Une décision de CMRA de 2025 l’a brillamment rappelé.

Lorsque vous contestez un dossier, vous avez le droit de consulter l’intégralité des pièces. Que faire si la CPAM ne produit que le Certificat Médical Initial (CMI) et le dernier certificat de prolongation, mais est incapable de fournir les 8 certificats intermédiaires ?

Vous devez soulever sa carence probatoire. La Caisse échoue à prouver la continuité des soins et l’imputabilité des lésions sur toute la période. Sans ces certificats, rien ne prouve que l’arrêt a été continu ou qu’une « lésion nouvelle » n’est pas apparue entre-temps. La CRA peut alors juger inopposable toute la période non documentée, limitant l’impact financier aux seuls arrêts dont la justification est explicitement prouvée. C’est un point crucial de la phase d’instruction AT-MP, même après la décision.

L’Angle AXEL.EXPERT

En tant qu’ancien inspecteur CPAM, l’analyse des certificats de prolongation était un réflexe. L’erreur que je vois le plus souvent chez les employeurs est de se focaliser uniquement sur le CMI et la DAT. Ils abandonnent le combat dès la prise en charge initiale.

Notre méthodologie est inverse : c’est souvent là que le vrai travail d’expertise commence. Nous « chassons » les incohérences dans la durée. Un passage du médecin traitant à un psychiatre, un changement de pathologie d’une ligne à l’autre, un « trou » dans la séquence des arrêts… ce sont ces détails, invisibles pour un non-initié, qui constituent les failles les plus solides pour obtenir une inopposabilité partielle ou totale des coûts. La maîtrise de votre tarification ne se joue pas seulement dans les 10 jours de réserves, mais sur toute la vie du dossier.

Passez à l’action : ne subissez plus les arrêts à longue durée

Un arrêt qui s’éternise n’est pas une fatalité. C’est un dossier qui doit être audité. Si vous avez des doutes sur la durée d’imputation d’un ou plusieurs AT/MP, il est temps de passer à l’action.

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À Propos de l’Auteur

Axel Gautier est un expert en précontentieux AT-MP, fondateur d’AXEL.EXPERT. Fort de 15 années d’expérience en tant qu’Inspecteur AT-MP à la CPAM, il met aujourd’hui son expertise unique au service des employeurs pour analyser, contester et maîtriser les coûts liés aux arrêts de travail.

Questions Fréquentes (FAQ)

Puis-je contester la durée d’un arrêt de travail pour un dossier déjà ancien ?

Oui. Vous pouvez contester l’imputabilité des arrêts au compte employeur tant que le délai de recours contre la notification de votre taux de cotisation n’est pas expiré. De plus, une action en inopposabilité peut souvent être soulevée bien après, notamment si une faille procédurale comme l’absence d’instruction d’une « lésion nouvelle » est découverte.

Expertise médicale : une arme pour contester la durée d’un arrêt de travail ?

Absolument. Si vous avez un doute sérieux sur le lien de causalité entre l’AT et les arrêts prolongés (suspicion d’un état antérieur prépondérant), c’est l’arme principale. Cette demande se fait dans le cadre d’une procédure de contestation, d’abord devant la CMRA puis, en cas de rejet, devant le Pôle Social du Tribunal Judiciaire. L’objectif est qu’un expert indépendant analyse le dossier médical complet.

Que faire si la CPAM refuse de me donner tous les certificats de prolongation ?

Le refus (ou l’incapacité) de la CPAM de vous fournir l’intégralité du dossier, y compris tous les certificats de prolongation, est une violation du principe du contradictoire. C’est un argument de droit à soulever devant la CRA pour soutenir votre demande d’inopposabilité, en arguant que la Caisse vous empêche de vérifier le bien-fondé de sa décision et manque à sa propre charge de la preuve. Pour en savoir plus, consultez le site d’Ameli.fr sur vos droits et démarches.